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La question de l'Incarnation

Théologie

Par le biais du prophétisme hébreu qui continue avec saint Paul et les grands mystiques (les saints), Tresmontant s’est arrêté à la figure de

« Ieschoua » qui signifie « le salut ». Il observe qu’il « n’y a pas autant de thèses de doctorat sur l’enseignement du rabbi galiléen que sur la doctrine de Platon, de Descartes, de Hegel ou de Kant. Il n’y en a même pas du tout. » (L’enseignement de Ieschoua de Nazareth, Seuil, 1970, p.237.)


En rejetant la séparation arbitraire entre d’un côté un Christ de l’histoire, et de l’autre, un Christ de la foi, Tresmontant propose de voir dans la christologie « une science qui a un fondement expérimental..

Peinture sur pierre, par Brunor

Christ au sourire, Huile sur Pierre, par Brunor.

Elle est fondée sur une expérience objective. Ceux qui nous ont fourni les informations ont vu, ont entendu, ont approché et touché Celui qui est l’objet de cette science qui est la christologie. Ils ont été témoins, en grec martures. La christologie a donc un fondement objectif. » (Ibid, p.213.)


Selon Tresmontant, le Christ, de l’adjectif christos qui signifie « oint », de l’hébreu mâschiach, c’est-à-dire : « l’homme qui a reçu l’onction », en français : « messie ». Ce Ieshouah dont le témoignage de ses proches nous dit qu’il est bien un homme, puis que l’on découvre comme appartenant à la lignée des prophètes d’Israël, puis davantage qu’un prophète, ne serait-il pas le Mâschiach annoncé ? Par la suite, les conciles vont scruter le contenu de la Révélation à son sujet pour discerner les gnoses et les hérésies et en s’appuyant sur l’Ecriture, comprendre qu’il est la « cellule-mère » de l’humanité qui donne les conditions de son achèvement ultime. Cet achèvement du « vieil Homme », de l’homme inachevé que je suis, n’est autre que la théosis, la divinisation, laquelle est l’union de l’être créé à l’être incréé, sans confusion des natures, comme l’ont définie les conciles.


En reprenant « l’Assumptus homo » des premiers siècles, puis théorisé par le théologien Duns Scot pour qui le Christ était la clef de voute de la Création, le dessein de Dieu, Tresmontant cherche à comprendre les conditions de possibilité de la divinisation de l’homme, sans confusion des natures ni des personnes. L’Église a en effet toujours maintenu, contre toutes les hérésies, l’union parfaite, sans confusion de nature, entre Dieu et l’homme. Cette union voulue « dès avant la fondation du monde » et réalisée depuis le premier instant de la création de l’âme de Jésus dans le sein de Marie, sa mère est l’Incarnation, d’après la formule du Pape Léon : « verus homo, vero unitus est Deo », l’Homme véritable uni à Dieu véritable. C’est pourquoi la connaissance de la christologie des conciles constituait, selon Tresmontant, le sommet de la métaphysique.


En se proposant de conduire l’humanité au but ultime de la création, soit la participation à sa propre vie divine, Ieschoua de Nazareth prodiguait un enseignement sur lequel il était de la plus haute importance de revenir : « L’enseignement de Ieschoua concernant la pauvreté consentie, l’insouciance, la douceur, la pitié, la paix, l’enfance, et les lois de la genèse du royaume de Dieu, malgré les apparences, malgré surtout les caricatures dont on a recouvert l’enseignement évangélique, malgré le masque dont il a été affublé, malgré la confiserie avec laquelle on a tenté de l’enrober et de le rendre inoffensif, – est tout le contraire d’un enseignement mièvre et efféminé. C’est un enseignement éminemment viril, profond et puissant. C’est l’enseignement de la virilité, de l’intelligence et de la puissance. C’est l’enseignement nécessaire pour que l’homme devienne vraiment homme, un homme libre, un homme achevé. Bien loin d’être sucre et confiserie, l’enseignement du rabbi est feu et sel. » (Ibid., p.232)

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Jérémy-Marie Pichon

Pour aller plus loin :
  • Saint Paul et le mystère du Christ, Paris, Seuil, collection « Maîtres spirituels », réédition 2006 [1956].

  • L’enseignement de Ieschoua de Nazareth, Paris, Seuil, 1970.

  • Introduction à la théologie chrétienne, Paris, Seuil, 1974.

  • Schaoul qui s’appelle aussi Paulus. La théorie de la métamorphose, Paris, O.E.I.L., 1989.

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